
Economie politique de la guerre dans le capitalisme contemporain
Laurent BARONIAN , Daria SABUROVA , Claude SERFATI
Mercredi 16 Octobre 2024
18h-20h30, MSE, Salle 114, première étage
La deuxième séance du séminaire Capitalisme cognitif 2024-2025 aura lieu le mercredi 16 octobre 2024 de 18h à 20h30 à la MSE, salle 114, première étage.
Laurent BARONIAN, Maitre de conférence en économie, Université Paris 13
Daria SABUROVA, Doctorante en philosophie Laboratoire Sophiapol Université de Nanterre
Claude SERFATI, Maître de conférences en économie, chercheur au C3ED, université de Saint-Quentin-en-Yvelines
Titre et résumé des communications de nos intervenant.e.s
Laurent BARONIAN - Économie politique et droit international du génocide
L’intervention portera sur la politique économique du colonialisme israélien depuis les Accords d’Oslo. Elle montrera comment la colonisation israélienne se présente comme une combinaison originale de colonisation génocidaire de peuplement et de colonisation oppressive d’exploitation, dans laquelle le projet d’expulsion d’un peuple de ses terres coïncide avec l’absorption de toutes ses richesses, humaines et non humaines. Une seconde partie sera consacrée à la genèse de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide en rapport avec la position de la diplomatie israélienne relativement à sa signature et sa ratification.
Daria SABUROVA - Une enquête ouvrière dans l’Ukraine en guerre
L'invasion russe de l'Ukraine a suscité une résistance populaire massive, souvent présentée comme un engagement citoyen se situant dans la continuité de la révolution du Maïdan. Cependant, notre recherche, fondée sur trois mois d'observation ethnographique et une quarantaine d'entretiens dans la ville industrielle de Kryvyï Rih, entre janvier et mars 2023, met en lumière les limites de cette interprétation. Une bonne partie de la classe ouvrière russophone, anti-Maïdan et critique des élites national-libérales, a également rejoint la lutte contre les forces d’occupation. De plus, la notion d'engagement citoyen tend à masquer les rapports de classe et de genre qui structurent la résistance. Contrairement à l’idée classique d'une économie de guerre centralisée et planifiée, la guerre en Ukraine présente des caractères néolibéraux : les impôts sur les entreprises baissent, tandis que se poursuivent les réformes de renforcement des mécanismes de marché. Les besoins des militaires en équipements de base, ainsi que les besoins des populations affectées par la guerre, sont en grande partie pris en charge par les organisations bénévoles, les classes populaires se trouvant essentiellement en bas de l’échelle de la sous-traitance humanitaire. C’est sur l’ambiguïté de ce travail de résistance, en tant que lutte de libération et une forme d’exploitation, que portera notre exposé.
Claude SERFATI - Un monde en guerres : quelques hypothèses sur l'économie politique du capitalisme contemporain
L’espace mondial se transforme sous la double pression des dynamiques économiques et des rivalités géopolitiques. Leurs interactions diffèrent selon les conjonctures historiques. Au cours des années 1990 et 2000, la ‘mondialisation armée’ – déguisée en ‘dividendes de la paix’ – a semblé être déconnectée du régime d’accumulation dominé par la finance, comme si la mise en place et la perpétuation de celui-ci était devenue une affaire ‘presque exclusivement économique’. Cette illusion a disparu à la fin des années 2000. Le ‘moment 2008’, cette conjonction de processus qui ont chacun leur propre temporalité – crise financière transformée en ‘longue dépression’, exacerbation des rivalités géopolitiques, dégradation accélérée de l’environnement - a provoqué un raccourcissement considérable de la distance entre les dynamiques économiques et les rivalités géopolitiques. Les sociétés humaines subissent les guerres de leur conjoncture historique. Bienvenue au monde en guerres…